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Le Soudan du Sud risque de retomber dans la guerre, avertissent les enquêteurs de l'ONU

New York, Etats-Unis (PANA) - Le Soudan du Sud risque de retomber dans un conflit ouvert si aucune mesure internationale urgente n'est prise, a averti, mercredi, l'organe d'enquête indépendant nommé par l'ONU pour examiner la situation des droits de l'homme dans ce pays.

 

S'adressant à l'Assemblée générale des Nations unies, la Commission des droits de l'homme au Soudan du Sud a souligné l'escalade des affrontements armés, les détentions politiques et les violations généralisées des droits de l'homme, appelant à des efforts coordonnés pour protéger les civils et faire respecter la justice.

 

«La transition politique au Soudan du Sud est en train de s'effondrer », a déclaré le commissaire Barney Afako à l'Assemblée. « Le cessez-le-feu ne tient pas, les détentions politiques sont devenues un outil de répression, les dispositions clés de l'accord de paix sont systématiquement violées et les forces gouvernementales recourent à des bombardements aériens dans les zones civiles. Tous les indicateurs laissent présager un retour à une guerre meurtrière».

 

La Commission a noté que les combats se sont intensifiés depuis mars, provoquant le déplacement de plus de 370 000 civils à l'intérieur du pays et poussant un nombre encore plus important à fuir vers les pays voisins.

 

Dans tout le Soudan du Sud, près de 2,6 millions de personnes restent déplacées, auxquelles s'ajoutent quelque 600 000 réfugiés, principalement originaires du Soudan.

 

« Les souffrances du peuple sud-soudanais ne sont pas des dommages collatéraux, elles sont la conséquence directe d'un échec politique », a déclaré la présidente de la commission, Yasmin Sooka.

 

« Une fois de plus, les civils sont bombardés, les femmes sont violées, les enfants sont déplacés et recrutés de force pour combattre, et des communautés entières vivent dans la peur. Tout cela n'est qu'une tragique répétition du passé douloureux du Soudan du Sud. Cette guerre contre le peuple du Soudan du Sud est le fait de l'homme et aurait pu être évitée».

 

Les enquêteurs ont souligné la complexité croissante du conflit, où les luttes de pouvoir politiques s'entremêlent avec les tensions ethniques et les griefs locaux.

 

Les remaniements gouvernementaux et les nominations partisanes ont aggravé la méfiance entre les signataires de l'accord de paix revitalisé de 2018, tandis que les combats localisés sont exploités à des fins politiques et militaires.

 

Le commissaire Carlos Castresana Fernández a établi un lien entre la crise et la corruption : « Des milliards de dollars provenant des revenus pétroliers ont été détournés tandis que la population meurt de faim. Les hôpitaux n'ont pas de médicaments, les écoles n'ont pas d'enseignants et les soldats ne sont pas payés, tandis que les élites s'enrichissent grâce à des contrats opaques et des accords hors budget. La corruption n'est pas un effet secondaire du conflit, elle en est l'un des moteurs », a-t-il déclaré.

 

Selon UN News, le rapport de la Commission détaille également les violences sexuelles, le recrutement forcé d'enfants et les exécutions extrajudiciaires qui se poursuivent, avec la complicité des autorités nationales dans certains cas.

 

Les institutions chargées de faire respecter l'état de droit restent sous-financées et les promesses de réforme des pouvoirs de détention sont largement restées lettre morte.

 

Les enquêteurs ont appelé l'ONU, l'Union africaine et les partenaires régionaux à garantir la responsabilité, à accélérer la mise en place du Tribunal hybride pour le Soudan du Sud et à engager la classe politique dans un processus inclusif.

 

« La paix ne viendra pas par des mots ou des poignées de main », a déclaré M. Sooka. « Elle viendra par des actions concrètes : mettre fin à l'impunité, protéger les civils et mettre en place des institutions au service du peuple, et non du pouvoir. La justice et la responsabilité ne doivent pas rester des promesses différées. La communauté internationale doit aller au-delà des expressions de préoccupation pour passer à des actions concrètes et coordonnées. Sinon, les souffrances ne feront que s'intensifier».

 

La Commission des droits de l'homme au Soudan du Sud, créée par le Conseil des droits de l'homme des Nations unies en 2016, est un organisme indépendant chargé d'enquêter sur les violations des droits humains dans le pays. Son mandat est renouvelé chaque année et ses membres exercent leurs fonctions sans percevoir de salaire.

-0- PANA MA/MTA/IS/SOC 30oct2025