Le conflit au Soudan devient plus meurtrier avec l'augmentation des attaques à motivation ethnique (Haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme)
Genève, Suisse (PANA) - Selon le Haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Volker, le conflit au Soudan prend « une tournure encore plus dangereuse pour les civils ».
Cette mise en garde fait suite à des informations selon lesquelles des dizaines de personnes ont été brutalement tuées lors d'attaques ethniques ciblées dans l'Etat d'Al Jazirah, dans le sud-est, et au milieu d'informations faisant état d'une bataille imminente pour le contrôle de la capitale du pays, Khartoum, a rapporté UN News.
Les Forces armées soudanaises (FAS) et une armée rivale, les Forces de soutien rapide (FSR), s'affrontent depuis avril 2023 dans ce que M. Türk a qualifié de « guerre insensée ».
Une situation désespérée qui s'aggrave
Alors qu'ils « luttent pour le contrôle à tout prix [...] les attaques directes et à motivation ethnique contre les civils sont de plus en plus fréquentes », a-t-il noté.
« La situation des civils au Soudan est déjà désespérée et il existe des preuves de la commission de crimes de guerre et d'autres atrocités. Je crains que la situation ne prenne aujourd'hui une tournure encore plus dangereuse », a-t-il déclaré.
Attaques contre les camps
Au cours de la seule semaine dernière, son bureau, le HCDH, a recensé au moins 21 morts au cours de deux attaques contre des camps à Al Jazirah, situé à une quarantaine de kilomètres de la capitale de l'État, Wad Madani.
Toutefois, le nombre réel d'attaques dirigées contre des civils et de civils tués est probablement plus élevé.
Le 10 janvier, au moins huit civils ont été tués lors d'une attaque contre le camp de Taiba, et au moins 13 femmes et un homme ont été enlevés. Les maisons ont été brûlées, le bétail, les récoltes et d'autres biens pillés, tandis que des dizaines de familles ont été déplacées.
Le lendemain, au moins 13 civils ont été tués, dont deux garçons, lors d'une attaque contre le camp de Khamsa.
Les autorités promettent une enquête
Ces attaques ont eu lieu dans le contexte de la reprise de Wad Madani par les Forces armées soudanaises. Les rapports suggèrent qu'elles ont été menées par les forces du bouclier soudanais dirigées par Abu Aqla Keikal, un ancien commandant des Forces républicaines de sécurité (RSF) qui a fait défection pour les Forces armées soudanaises en octobre dernier.
Les attaques auraient visé les Kanabi, un groupe historiquement marginalisé composé principalement de Nuba et d'autres tribus africaines.
M. Türk a pris note de l'assurance donnée par les autorités soudanaises que ces attaques feraient l'objet d'une enquête approfondie et que les responsables seraient traduits en justice, et qu'un comité d'enquête avait été créé.
« Les attaques de représailles - d'une brutalité choquante - contre des communautés entières sur la base d'une identité ethnique réelle ou supposée sont en augmentation, tout comme les discours de haine et l'incitation à la violence. Il est urgent d'y mettre un terme », a-t-il déclaré.
Violences filmées
Le HCDH a reçu trois vidéos montrant des scènes de violence, y compris des exécutions illégales. Elles auraient été filmées à Wad Madani, avec des hommes en uniforme des Forces armées soudanaises visiblement présents, selon UN News.
Dans les vidéos, les victimes sont déshumanisées et dénigrées comme « Wassekh » (saleté), « Afan » (moisissure), « Beheema » (animal) et « Abnaa E-dheif » (bâtards), et les exécutions sommaires sont saluées par les auteurs comme « Nadhafa » (une opération de nettoyage).
Préoccupations pour le Darfour-Nord
De graves inquiétudes persistent également pour les civils du Nord-Darfour, où les attaques à motivation ethnique menées par les forces de sécurité et les milices arabes qui leur sont alliées contre des groupes ethniques africains, en particulier les Zaghawa et les Fur, continuent de faire d'horribles victimes.
Par ailleurs, quelque 120 civils auraient été tués et plus de 150 blessés lors d'attaques de drones dans la ville d'Omdurman, le 13 janvier, qui auraient été lancées par les Forces armées soudanaises sur un marché de la place Ombada Dar es Salam, une zone contrôlée par les Forces armées soudanaises.
Mettre fin aux combats
M. Türk a réitéré son appel à l'arrêt des combats et au respect par les belligérants des obligations qui leur incombent en vertu du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme.
Il a également mis en garde contre la prolifération du recrutement des milices et la mobilisation des combattants - en grande partie selon des critères ethniques - qui risquent de déclencher une guerre civile plus large et des violences intercommunautaires.
Appel aux belligérants
« Les FAS et les FSR sont responsables des actions des groupes et des individus qui combattent en leur nom », a-t-il déclaré.
Il les a exhortés à « prendre des mesures immédiates pour assurer la protection de tous les civils, notamment en prenant toutes les mesures possibles pour éviter ou, à tout le moins, réduire au minimum les dommages causés aux civils dans la conduite des hostilités ».
Il est essentiel que des enquêtes rapides, indépendantes, impartiales et transparentes soient menées sur toutes les informations faisant état de violations et d'abus, a-t-il ajouté.
-0- PANA MA/MTA/SOC 18janvier2025