L’Union européenne desserre l’étau financier autour du Burundi
Bujumbura, Burundi (PANA) - Un projet sous-régional d’interconnexion du réseau électrique national a bénéficié d’un don de 14,7 millions d’euros de l’Union européenne (UE), cinq ans après le gel de la coopération technique et financière avec le Burundi, suite à la crise politique et des droits humains autour des élections controversées et émaillées de violences de 2015, a-t-on appris samedi, de source diplomatique à Bujumbura.
Le gel porte sur plus de 430 millions d’Euros d’aides budgétaires directes à l’Etat burundais, sur la période 2014-2020.
Le 25 Octobre 2018, le Conseil de l’UE annonçait le renouvellement des sanctions à l'encontre du Burundi, au moins jusqu'au 31 octobre 2019.
Des sanctions diplomatiques frappent encore certaines hautes personnalités burundais de l'appareil sécuritaire, interdites de pénétrer sur le territoire de l'UE et dont les avoirs ont été gelés pour "actes de « violence, de répression ou d'incitation à la violence », ainsi que des "actes constituant des atteintes graves aux droits de l'homme ».
La communauté internationale fait de plus en plus montre d'ouverture depuis l'annonce du chef de l’Etat burundais, Pierre Nkurunziza, de ne pas se représenter aux prochaines élections générales de 2020, au bout de trois mandats successifs, dont celui de 2015 auquel l’on attribue généralement l'origine de la crise politique encore ouverte dans le pays.
La reprise de la coopération technique et financière entre le Burundi et son principal partenaire technique et financier historique de l'Ue n'est toutefois pas directe pour le moment.
Dans un communiqué publié à Bujumbura, la capitale économique du Burundi, la Banque africaine de développement (AfDB) indique avoir signé, vendredi, deux accords de dons avec le gouvernement burundais, « sur des ressources mobilisées auprès de l’UE en faveur du secteur de l’énergie du pays ».
Le premier don, d’un montant de 14,7 millions d’euros, a vocation à financer la construction du poste de Rubirizi (à la périphérie nord-ouest de Bujumbura), dans le cadre du projet d’interconnexion des réseaux électriques des pays des lacs équatoriaux du Nil (NELSAP). Le second accord, de 15 millions d’euros, contribuera au financement de la partie burundaise du même projet d’interconnexion électrique.
Le communiqué précise que les accords ont été paraphés par le ministre burundais des Finances, du budget et de la coopération au développement économique, Domitien Ndihokubwayo, et le responsable pays de la Banque Africaine de développement au Burundi, Daniel Ndoye, en présence de Claude Bochu, chef de la délégation de l’Union européenne (UE) au Burundi.
« Ces deux projets sont particulièrement importants pour le Burundi dans la mesure où ils visent à renforcer les capacités de production et de transport d’électricité du Burundi », souligne le communiqué.
La BAD agit « en qualité d’administrateur des ressources au titre de la convention de délégation de l’UE en vue d’une gestion indirecte », selon la même source.
L’on apprend encore que ces deux projets bénéficient déjà de ressources budgétaires du gouvernement burundais ainsi que de financements en cours de la BAD, à savoir un don du Fonds africain de développement de 15,70 millions d’euros et des dons du Fonds africain de développement et du Fonds d’assistance technique de 6,79 millions d’euros.
Le texte du communiqué fait savoir que le Ministre Ndihokubwayo a salué le soutien de la BAD et de l’UE pour ces deux projets « particulièrement importants pour le Burundi dans la mesure où ils visent à renforcer les capacités de production et de transport d’électricité du Burundi, à développer davantage le marché régional de l'énergie électrique et à contribuer ainsi à stimuler la croissance économique et améliorer le bien-être des populations au Burundi ».
De son côté, le représentant résident de la BAD s’est réjoui de la « bonne collaboration qui a prévalu, pour conclure ces accords, entre le Burundi, la BAD, l’UE et les communautés économiques d’Afrique de l’Est et d’Afrique centrale ».
« La BAD est disponible pour continuer à accompagner, sur les plans financier et technique, le développement du secteur énergétique au Burundi », conformément aux priorités stratégiques de la Banque et de son Document de stratégie-pays (DSP 2019-2023) au Burundi », conclut le communiqué.
Le chef de la délégation de l’UE au Burundi, Claude Bochu, quant à lui, a salué « la concrétisation de ces deux projets », financés en partenariat avec la BAD, qui est devenu « un acteur majeur » pour les projets d’énergie et d’infrastructure en Afrique ».
M. Bochu a rappelé les projets énergétiques sur lesquels la BAD et l’UE collaborent déjà, et les échanges en cours pour la conclusion d’un partenariat pour la rénovation du port de Bujumbura.
L’on apprend encore du communiqué que Wale Shonibare, Directeur et Vice-Président par intérim du « Complexe électricité, énergie, climat et croissance verte » (PEVP) à la BAD a salué la signature de ces deux accords de dons et indiqué que les deux projets participent à la mise en place du marché régional de l’électricité pour lequel la Banque travaille activement.
Dans les chiffres de la BAD, le Burundi est caractérisé par un très faibles taux d’électrification nationale d’à peine 10% et conséquemment par une faible consommation (environ 23 kWh par habitant et par an) qui se situe parmi les plus basses en Afrique par rapport à la moyenne africaine de 150 kWh/an et par ménage.
Les industries et les activités commerciales au Burundi consomment plus de 70 GWh, 84 GWh pour les ménages et 46 GWh pour les autres consommateurs. Ce manque d’accès constitue un facteur limitant le développement économique et la réduction de la pauvreté.
De près de 70.000 abonnés, en 2012, la Régie nationale de production et de commercialisation de l’eau et l’électricité (REGIDESO) prévoit de servir plus de 150.000 abonnés à l’horizon 2020.
Dans sa description, le nouveau projet multinational d’interconnexion comprend, entre autres ouvrages, l’installation d’un poste à 220 kilovolts (kv), à Rubirizi, au plus proche de la demande électrique de la ville de Bujumbura.
L’autre ouvrage est une ligne de transport d’énergie électrique à 220 kv, d’une longueur d’environ 77 kilomètres, entre le futur poste de Kamanyola, situé à 2,4 km de la frontière avec la République démocratique du Congo, et le futur poste 220 kV/110/30/10 kV de Rubirizi, près de Bujumbura.
Deux autres lignes biternes à 110 kv, de 5 km chacune, sont prévues pour l’interconnexion du nouveau poste 220 kv de Bujumbura au poste existant sur la route nationale numéro 1 (RN1).
Le projet prévoit encore l’extension du poste existant sur la même RN1, pour le raccordement du nouveau poste 220 kv à travers une nouvelle travée de ligne à 110 kv.
-0- PANA FB/TBM/SOC 21déc2019